Le pogromLes Allemands sont accueillis en libérateurs par une partie de la population, qui accuse la population juive d'avoir collaboré avec les soviétiques, reprenant le slogan antisémite
« żydokomuna » des nationalistes d'avant-guerre. Le 27 juin 1941, les Allemands forment une administration locale avec des collaborateurs polonais, composée de Józef Mordasiewicz, Leon Kosmaczewski, assistés du prêtre Aleksander Dołęgowski, et du chef de la police locale, Konstanty Kiluk.
La place centrale, où ont été réunis les Juifs
avant d'être emmenés de force dans la grange. Le 7 juillet au matin, l'
Einsatzgruppe B du SS-Obersturmführer
Hermann Schaper arrive à Radziłów et fait rassembler la population juive du village et des environs sur la place du marché pour les livrer à une séance d'humiliation publique devant la population polonaise, faisant brûler leurs livres saints. Les Allemands quittent le village peu après, encourageant les villageois à massacrer la population juive. Selon l'historien Krzysztof Persak, chercheur à l'
Institut de la mémoire nationale, l'Einsatzgruppe du SS Schaper a délibérément encouragé la population à effectuer elle-même le pogrom, s'appuyant sur une directive récente du
RSHA du 29 juin 1941 rédigée par
Reinhard Heydrich, selon laquelle les forces d'occupation
« ne doivent pas faire obstacle aux sentiments anticommunistes et antisémites des populations des territoires occupées. Au contraire, ils doivent être encouragés sans laisser de traces, et dirigés dans le droit chemin.»Les habitants, menés par le prêtre collaborationniste Dołęgowski forcent ensuite les Juifs à rentrer dans une grange voisine. Celle-ci est incendiée, et ceux qui tentent de s'échapper sont massacrés sur place. La tuerie se poursuit jusqu'au 10 juillet, tandis que les biens des Juifs sont pillés. Des habitants récupèrent par la suite les dents en or sur les corps calcinés.
30 Juifs réussissent à survivre grâce à la complicité de quelques Polonais. Les survivants, se cachant dans des fermes environnantes, sont jusqu'à la fin de la guerre à la merci de maître chanteurs (les
szmalcownicy) qui les menacent de les dénoncer ou de les tuer s'ils ne leurs laissent pas leurs biens.
Des bilans élevés, avancés notamment par le survivant Menachem Finkelsztejn, vont jusqu'à un chiffre de 1700 morts.
Anna Bikont considère ce chiffre exagéré, et estime à 500 le nombre de Juifs brûlés vifs dans l'incendie de la grange, suivi de massacres épars de 100 à 200 Juifs.
SuitesLe pogrom de Radziłów a été suivi trois jours plus tard par le
massacre de Jedwabne, où plus de 300 Juifs ont été brûlés vifs dans une grange par la population polonaise, à 18 kilomètres de Radziłów. Plusieurs autres pogroms seront commis dans cette région de la
Podlachie tout au cours de l'été 1941, notamment à
Szczuczyn ou à
Wąsosz.
En août 1941, les survivants sont rassemblés de force dans un ghetto, qui ne rassemble que 18 personnes. Ils seront astreints à divers travaux forcés, avant d'être déportés au
camp d'extermination de Treblinka. Après l'arrivée des
troupes soviétiques, des anciens collaborateurs polonais assassinent deux des derniers survivants. Huit personnes seront jugées après la guerre, et deux d'entre elles seulement seront condamnées à des peines allant de 4 à 6 ans de prison.
En 1965, Hermann Schaper est poursuivi pour crimes de guerre par le tribunal de Hambourg, à cause de sa présence à Radziłów le jour du pogrom. Les charges seront abandonnées pour manques de preuve et à cause de son état de santé.
En 2001, à l'occasion du 60ème anniversaire des pogroms de Podlachie, le président
Aleksander Kwaśniewski déclare que les pogroms de Jedwabne et de Radziłów
« jettent une ombre sombre sur l'histoire de la Pologne.»