Les débutsLe camp de
Westerbork se situe à 15 kilomètres du village homonyme (55 km au sud de
Groningue). Le camp, de 500 mètres de large sur 600 de long (soit près d'un demi kilomètre carré), fut construit en 1939 par les autorités néerlandaises pour y loger les réfugiés
juifs allemands légaux et clandestins avec l'objectif à terme d'une émigration vers la
Palestine. Il fut d'abord sous la tutelle du ministère de l'intérieur, puis sous celle de la justice à compter du 16 juillet 1940. Les premiers réfugiés arrivèrent à l'automne 1939. En mai 1940, leur nombre atteignit 800 et 1 100 en juillet 1941. Pendant cette période les autorités d'occupation firent le recensement de toute la population juive néerlandaise qui dès lors fut assignée à résidence dans des conditions très difficiles.
Mirador à Westerbork
L'administration SSÀ partir de 1941, les Allemands firent de Westerbork un camp de transit dans le cadre de la politique de déportation et d'extermination des Juifs et des
roms. Des baraques en bois furent édifiées, des barbelés entouraient le camp mais serpentaient aussi entre les baraques. Aux quatre coins se dressaient des miradors. À partir du 1er juillet 1942, la police de sécurité SS le
SD administra le camp dirigé tour à tour par Erich Deppner (juillet et août 1942), Joseph Hugo Dischner (1er septembre au 9 octobre 1942) et
Albert Konrad Gemmeker (9 octobre 42 jusqu'à la libération du camp). De juillet 1942 à janvier 1943, le commandement fut double (allemand et néerlandais), Jacques Schol étant commandant néerlandais.
L'organisation interneUn
Judenrat fut créé pour faciliter l'organisation des convois dont les horaires, taille et destination étaient fixés par les SS avec au centre du processus un fichier central pour constituer les listes de déportation ou « listes de convoi ». Celles-ci étaient constituées dans les 48 heures précédant le départ de chaque convoi et susceptibles de modifications jusqu'au dernier moment. L'établissement de la liste était délégué aux chefs des différents services : une
police juive (Judischer ordnungsdienst) qui compta jusqu'à 180 personnesa 5 assurait le maintien de l'ordre et constituait les wagons de transport vers
Auschwitz ou d'autres camps.
Cabanon où séjourna Anne Frank en aout et septembre 1944.
Cohabitaient dans le camp une école, un hôpital de plus de 1 000 lits, un orphelinat, une synagogue, une morgue, une fabrique de semelles, un orchestre, un restaurant et diverses activités culturelles pour rassurer les détenus et endormir leur soupçons sur le sort tragique qui les attendait.
Les baraques pénitentiaires pouvaient accueillir plusieurs centaines de personnes, dans des conditions insalubres (hangars de planches disjointes, châlits de fer s'entassant sur trois niveaux, quelques poêles disséminés dans l'immense salle). Environ 2 500 personnes étaient par ailleurs logées dans 215 maisonnettes de deux ou trois petites pièces. En décembre 1942,
Etty Hillesum recensait environ 10 000 personnes réparties entre ces logements (
« De toutes les pénuries dont souffre Westerbork, la pénurie de place est certainement la pire. »):
« Tout, ici, n'est que paradoxe. Dans les grandes baraques, où beaucoup s'étendent sans draps ni couvertures, sans matelas, à même les sommiers de métal, on meurt de froid. Dans les petites maisons, reliées au chauffage central, une chaleur étouffante vous empêche de dormir la nuit. Je loge dans une de ces petites baraques d'habitation avec cinq de mes collègues. Lits superposés deux par deux. Ces lits sont très branlants [...] Et, la nuit, des souris rongent nos lits et grignotent nos provisions - pas vraiment le grand calme. »
— Etty Hillesum, Une vie bouleversée suivie de Lettres de Westerbork, p.251 - 252