Aux environs du 1er novembre 1941, la constitution du ghetto fut terminée et tous les juifs y étaient installés. Le chef du ghetto no 1 était Kurt Wiese, celui du ghetto no 2 Otto Streblev. Tous deux s'appliquaient et prenaient plaisir à fusiller personnellement des juifs et, par des témoins oculaires, on sait que Kurt Wiese devait changer de vêtements deux fois par jour parce qu'ils étaient tachés de sang.
Conditions de vie dans le ghettoLes conditions de vie dans le ghetto de Grodno étaient extrêmement pénibles, humiliantes, inhumaines. Selon le témoignage du survivant Khaïm Chapiro :
faebd7« On portait l'étoile jaune de David devant et derrière. On ne marchait pas sur les trottoirs. On crachait sur nous, on pouvait nous tuer, si un Allemand vous attrapait. Et les Polonais aussi se moquaient méchamment. Nous étions des gens sans droits. Il arrivait, en se levant le matin, de sortir et de voir des pendus aux balcons… ». Toutefois les prisonniers souffraient relativement moins de la faim dans ce ghetto que dans beaucoup d'autres, et furent tués plus tard.
Les hitlériens intégrèrent Grodno par la création dans le
troisième Reich du
Reichskommissariat Ostland (« Les territoires de l'Est ») qui comprenait cette ville.
Les gens qui risquaient leur vie tous les jours, s'ingéniaient à échanger des vêtements et des objets personnels en échange de quelques aliments.
Dans les deux ghettos étaient distribués pour un prix modique des cartes de rationnement pour le pain, en échange desquels les juifs recevaient environ 200 grammes de pain par jour. Parfois le Judenrat, dans des circonstances spéciales, parvenait à obtenir de la viande de cheval. Dans les caves de la
Grande synagogue chorale de Hrodna, les juifs parvinrent, quelque temps, à constituer une réserve de pommes de terre, que le judenrat partageait un peu entre les prisonniers.
Durant les premiers mois de l'existence du ghetto, les meurtres ne furent pas la cause principale des décès de prisonniers. La plus grande partie de ceux-ci étaient dus à des suicides de désespérés par l'horreur de la situation, ou à la mort pour cause de maladie. Beaucoup d'enfants moururent parce que leur organisme de supportait pas les conditions de survie dans le ghetto. Suivant les mots d'un prisonnier survivant, Frane Brojdie :
« Les Allemands avaient atteint leur but. Physiquement et moralement les juifs étaient brisés. Ils étaient entièrement soumis. On leur avait enlevé leurs biens mais aussi leur capacité de raisonner. L'apathie, la fatigue, le désespoir, s'étaient emparés des juifs, ce qui facilitait le travail d'extermination des Allemands ».
Les juifs étaient obligés de vivre dans une horrible promiscuité, à tel point que beaucoup n'avaient même pas la place pour se coucher et qu'ils dormaient assis. C'est pourquoi, en décembre 1941, les nazis furent obligés de déplacer une partie des prisonniers du ghetto no 1 vers le no 2 qui était moins peuplé.
Destruction du ghettoÀ l'époque de l'existence des deux ghettos à Grodno, 42 000 juifs passèrent par ce camp, parmi lesquels environ 20 600 perdirent la vie.
Les assassinats des juifs dans la ville elle-même furent commis sur le territoire de la prison de la ville, dans la maison de la rue du Kominterm, au fort no 2, dans la Grande synagogue chorale (c'est là que d'habitude on fusillait les juifs malades ou blessés) et encore en d'autres endroits. Plus de 1 000 prisonniers furent fusillés dans l'ancien cimetière juif. Outre les juifs fusillés ou tués sous les coups, d'autres mourraient aussi à la suite de l'exécution de travaux éreintants, de faim, de manque d'hygiène provoquant des maladies et des épidémies.
Grande synagogue chorale de Grodno en 2011. Il faut encore remarquer que la
Grande synagogue chorale de Hrodna, servit durant la guerre de centre de rassemblement des Juifs sous contrôle des Allemands avant leur envoi vers les camps de concentration en Pologne, ou avant de les fusiller.
Le 1er novembre 1942, les Allemands commencèrent à envoyer les juifs du ghetto et des petits villages proches de la ville vers le camp de Kolbasino, et dès le 2 novembre 1942, les deux ghettos furent cernés et bloqués par des gardes. La plupart des prisonniers du camp de Kolbasino furent ensuite envoyés dans des wagons à bestiaux aux camps de
Auschwitz et
Treblinka et y moururent. Le premier transport de Juifs de Grodno vers Auschwitz eut lieu le 18 novembre 1942.
La synagogue en cours de restauration en février 2015. L'administration de l'état-civil allemande a établi que jusqu'en 1943, 20 577 juifs furent envoyés de force hors de Grodno : certains restèrent au camp de Kolbasino et d'autres partirent pour les camps de la mort en Pologne. Au
Stalag-353 à l'automne 1942 on amena que des Juifs, mais, selon certains témoins, en décembre 1942 environ 30 000 juifs des villages du
district de Białystok(de l'oblast de Grodno et de
Białystok en Biélorussie) y furent amenés également. Parmi ceux-ci, 27 000 personnes furent emmenées et tuées en une semaine, le reste, soit 3 000 personnes furent emmenées au ghetto de Grodno no 1 et exterminées plus tard.
Le 12 février 1943, le chef du ghetto no 1, Kurt Wiese ordonna au
judenrat de lui envoyer 400 hommes, soi-disant pour travailler à la clôture du ghetto. Le 13 février, les gens choisis (il n'y avait parmi eux que des hommes du ghetto) furent enfermés dans la Grande synagogue. Ceux qui tentaient de s'enfuir étaient fusillés sur place. Les travailleurs du judenrat et les ouvriers qualifiés furent séparés des autres et fusillés ; le président du judenrat Braver fut abattu personnellement par Kurt Wiese. Les 2 500 hommes furent chassés du ghetto vers la station de la voie de chemin de fer par la rue Brigitka et conduits au camp de la mort de
Treblinka (distant de 150–160 km de Grodno). Après avoir éliminé les membres du judenrat, la
gestapo tua Serebriansk, le chef de la
police juive du ghetto.
Le 12 mars 1943, le ghetto de Grodno fut détruit, les quelques prisonniers rescapés furent emmenés au
ghetto de Bialystok (mais jusqu'en mai 1943 des juifs furent encore attrapés et tués). Grodno, pouvait selon les rapports Allemands du 13 mars 1943 être déclarée
« libre de juifs », bien que lorsqu'elle fut libérée le 14 juillet 1944, il y avait encore entre 40 et 50 juifs vivants.
La Brigade des biélorusses chercha dans le ghetto les objets de valeurs en frappant ou démontant soigneusement les murs et les planchers. Quand ils trouvaient des juifs vivants, cela était très apprécié des Allemands qui payaient grassement ; de même que pour la découverte de caches (appelées « malina » par les Juifs).
Les Juifs tués dans la ville furent ensevelis dans les fossés des 12 forts de Grodno et dans les ravins. Dans le but de cacher les preuves de leurs crimes, à partir du printemps 1944, les nazis commencèrent à camoufler les traces de massacres de masse avec les juifs qui avaient survécu et les prisonniers : nivellement des lieux d'ensevelissement, plantation de fleurs et de légumes en surface, (c'est ainsi qu'ils firent dans la cour de la prison). Dans les cimetières de Grodno, de Kolbasino, de Lososno, du fort no 2, ils déterrèrent les corps de victimes et les firent brûler. La
Commission extraordinaire de l'État, dans son protocole du 26 juin 1945 a établi que les fosses où étaient ensevelis les corps après les massacres de masse, avaient une largeur de 2–6 m sur une longueur de 50–100 m ; en profondeur les victimes étaient entassées sur 7 rangées de cadavres superposeés.